Utrillo… à Montmartre

Publié par la Gazette Drouot

Que serait Montmartre sans Maurice Utrillo ?
L’artiste en a fait l’un de ses motifs de prédilection…

Cet autodidacte a découvert la célèbre butte parisienne en 1904 grâce à André Utter (1886-1948), natif du quartier. Jusque-là, le jeune homme a ses habitudes sur les quais de Seine et à Montmagny, dans la banlieue nord de la capitale. Fils naturel de Suzanne Valadon (1865-1938), Maurice est reconnu en 1891, onze ans après sa naissance, par Miguel Utrillo, journaliste, peintre et homme de lettres espagnol. À la suite de crises d’éthylisme, il est hospitalisé à plusieurs reprises, et se met à peindre. Sans aucun académisme. Une façon de tenir l’alcool à distance… En 1910, des collectionneurs commencent à s’intéresser à son œuvre. Sa palette s’éclaircit, ses tons, subtils, restituent l’atmosphère de Montmartre. En 1912, il s’installe avec sa mère et André Utter, devenu son compagnon, au 12, rue Cortot. C’est sa période blanche, où l’étrangeté d’espaces vidés de toute présence répond à des détails pittoresques : murs écaillés, ciels froids, branches enchevêtrées dépassant d’une clôture… Utrillo fera plusieurs séjours à la clinique de Sannois, où il réalisera plus de cent cinquante peintures, que le public découvre lors d’expositions dans les galeries Berthe Weill, Georges Petit, Bernheim-Jeune. Au lendemain de la guerre, sa notoriété s’affirme également parmi les écrivains, au premier rang desquels Francis Carco. En 1919, le poète et marchand d’art polonais Léopold Zborowski, installé à Paris depuis quelques années, prend en charge les frais d’hospitalisation de l’artiste à l’asile de Picpus, et requiert l’aide financière d’un homme d’affaires et d’un industriel : Jonas Netter et Pierre Levasseur (1890-1941). Avionneur de talent, ce dernier s’intéresse aussi aux bateaux et à la peinture. Il signe le 10 octobre de la même année un contrat d’exclusivité avec Maurice Utrillo, stipulant que ce dernier lui fournira chaque mois sept tableaux, contre une mensualité de 2 000 francs. Les amateurs se faisant de plus en plus nombreux, André Utter renégocie l’accord, faisant passer à six le nombre d’œuvres à produire et les émoluments à 2 500 francs. Mais les internements du peintre se succèdent, tout comme ses frasques, et pour honorer le contrat, il faut livrer quelques toiles anciennes… Tel sera le cas de notre vue du Maquis de Montmartre, réalisée au début des années 1910. Cette composition aux lignes dynamiques et aux forts contrastes de tons est conservée dans la collection de Pierre Levasseur. Elle est l’une des quatorze toiles d’Utrillo de cette provenance à connaître son baptême… du feu des enchères.

Vendredi 23 novembre, salle 9 - Drouot