Objets surréalistes


Fidèle au principe de leur esthétique, illustrée par la phrase de Lautréamont : “Beau comme la rencontre fortuite d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection”, l’objet surréaliste est le fruit du collage d’objets les plus inattendus, issus de la rencontre de deux réalités différentes sur un plan qui ne leur convient pas. L’effet cherché est toujours la surprise, l’étonnement, le dépaysement comme celui provoqué par l’irruption du rêve dans la réalité. L’association d’objets se faisant au nom de la libre association de mots ou d’idées qui, selon Freud, domine l’activité inconsciente et en particulier l’activité onirique. Dès 1924, André Breton, dans son Introduction au discours sur le peu de réalité, propose de fabriquer « certains objets qu’on n’approche qu’en rêve ». Les surréalistes, artistes et écrivains, vont s’adonner passionnément à cette pratique.

L’objet surréaliste est une doublure de l’image surréaliste, cette fois-ci en trois dimensions. Son auteur associe les éléments les plus hétéroclites de manière insolite et provocante afin de déclencher le choc de la surprise et transporter le spectateur dans un univers de rêve.

Ainsi lors de l’exposition de Charles Ratton en 1936, Breton rend compte dans un court article qui sert de catalogue : « On y trouve des objets naturels – minéraux (cristaux enfermant de l’eau fossile), végétaux (plantes carnivores), animaux (tamanoir d’œuf d’oepyornix) – des objets naturels interprétés (singe en fougères) ou incorporés à des assemblages – des objets perturbés (modifiés par des agents naturels tels qu’incendie ou tremblement de terre, par exemple la verrerie fondue après l’irruption de la montagne Pelée) – les objets trouvés, exposés tels quels ou interprétés – des objets mathématiques découverts à l’Institut Poincaré par Ernst et photographiés par Man Ray – des objets sauvages (fétiches et masques) et enfin des objets surréalistes proprement dits. »
Breton ajoute : « La conception surréaliste de l’objet fait place en effet à la création de l’objet surréaliste, tel que vient de le définir Dali qui, pour sa part, propose sous cette étiquette son Veston aphrodisiaque couvert de verres emplis de liqueur ».
 

Les trois objets que nous avons le plaisir de vous présenter sont la synthèse de la définition de « l’objet surréaliste » tel qu’André Breton le concevait.
Bien qu’on ne puisse les identifier formellement sur les images qui nous sont parvenus de l’exposition de Charles Ratton en 1936, leur intérêt historique n’en reste pas moins indubitable.