Les tsubas d’un collectionneur
Publié par la Gazette Drouot
Guerriers et esthètes, les samouraïs portaient un grand soin à leurs armes et à leurs accessoires, les gardes de sabre en étant un parfait témoignage.
La qualité de la collection de près de 220 tsubas réunie par Patrick Liebermann n’a pas échappé aux collectionneurs de ces petits objets emblématiques de la culture ancestrale du Japon, et la vacation s’est conclue sur le produit total de 392 678 €.
L’ensemble avait fait l’objet du Focus de la Gazette n°31 (page 18). Plusieurs de ces gardes de sabre y étaient reproduites et l’auteur y revenait longuement sur leur histoire, la variété de leurs matériaux et de leurs incrustations ainsi que la richesse de leur décor, le tout sur quelques centimètres de diamètre ou de hauteur...
Évidemment, comme dans toute collection de ce type, des surprises sonnantes et trébuchantes sont venues se glisser, l’enchère la plus élevée revenant moyennant 22 750 € à une pièce qui était passée sous les radars. Il s’agissait de ce tsuba quadrilobé (mokko gata) en fer incrusté d’or, réalisé par un artiste appartenant à l’école Tanaka et œuvrant à la fin de l’ère d’Edo. Son sujet est, il est vrai, parfaitement emblématique puisqu’il figure le vol d’un dragon devant le mont Fuji, le symbole national entre tous du Japon. C’est ensuite un tsuba carré aux bords arrondis (kakumaru gata) en fer de la même école (h. 8,7 cm), à décor incrusté de cuivre et argent (taka zogan) sur une face du dieu du vent Fujin et en alliage d’argent et cuivre (shibuichi) sur l’autre de feuilles et bourrasques, qui tourbillonnait à 11 050 €. Le serpent dressé sur un modèle carré (nadekaku gata) en fer incrusté (h. 9 cm) de la fin de l’époque d’Edo attrapait, non pas le petit singe que sa mère attentive protégeait, mais 10 660 €. Le vocabulaire descriptif nécessitait au passage de bien connaître le japonais, ou tout au moins d’en posséder les codes !
Parmi les pièces reproduites dans l’article susmentionné, le très poétique tsuba en alliage de cuivre et argent à motif de corbeaux volant devant la pleine lune, une pièce du XVIIIe siècle de l’école Rinsendô, décrochait 9 750 €. 7 800 € revenaient ensuite à un modèle en fer entièrement ajouré du XVIe siècle, au décor retranscrivant les vers d’un poème (h. 8,8 cm), et 7 280 € à un autre de même époque en fer incrusté de clous de laiton et élégamment découpé, dessinant la silhouette d’un hippocampe. Un dernier regard vers les 6 760 € d’un sumi kiri gata (tsuba carré et octogonal) décoré d’un daim aux yeux incrustés d’or, au pelage traduit avec naturel (h. 6,7 cm), et il était l’heure de quitter le Japon et ces petites merveilles de sa culture ancienne.
VENDREDI 20 SEPTEMBRE, SALLE 11 – HÔTEL DROUOT.
TESSIER & SARROU ET ASSOCIÉS OVV. CABINET PORTIER & ASSOCIÉS.
Japon, école Tanaka, fin de l’époque Edo (1603-1868)
Mokko gata en fer incrusté d’or à décor d’un dragon volant au-dessus des vagues écumantes devant le mont Fuji
Signé Toshigake
H. 8,4 cm.
Adjugé : 22 750 €