Patrick Liebermann


Il naquit à Strasbourg en 1948. Licencié en droit et diplômé d’une école de commerce et de management, il rejoignit les affaires familiales. Globe-trotter curieux des cultures, c’est au cours d’un premier voyage au Japon en 1970, année de l’Expo universelle d’Osaka, qu’il acquit par hasard, sur un coup de cœur, sa première tsuba, sans savoir que c’était une garde de sabre. Le virus était pris. Il sut depuis s’entourer des conseils avisés de grands marchands et il devint rapidement un collectionneur acharné et chevronné. Pendant plus d’un demi-siècle, il réalisa cette impressionnante collection, privilégiant toujours la qualité à la quantité. Les amateurs de tsuba ont eu l’occasions de le vérifier en admirant un florilège de sa collection exposée à la Bibliothèque Universitaire de Strasbourg au cours du premier semestre 2022.
A la différence de la plupart des collections françaises constituées à partir du fonds des tsuba entrées en abondance en France à la fin du 19ème et au début du 20ème siècle, une grande partie des pièces de sa collection a été acquise au Japon même, où il se rendit un vingtaine de fois, d’où la présence de nombreuses pièces peu courantes. La recherche de l’originalité fut précisément un des moteurs de M. Liebermann. Comme toute collection, sa collection est le reflet de son choix, un choix qu’il assume : plutôt que de se focaliser sur les sukashi ou les kinkô, sur telle ou telle école ou époque, il s’intéressait essentiellement au thème. Comme il le disait lui-même, « la qualité artistique, l’originalité des thèmes traités et la finesse de l’ouvrage [furent ses] guides ». Partageant avec le peuple japonais un « amour inconditionnel de la nature », il fit la part belle au bestiaire japonais réel ou fictif. Il convient d’ajouter à ces qualités, l’état toujours « fleur de coin » de ses tsuba, quelle que soit leur époque. Cette approche « iconographique » n’empêcha pas Patrick Liebermann de réaliser un travail de documentation approfondi sur chacune de ses nouvelles acquisitions avec curiosité et érudition, faisant preuve de rigueur et d’intelligence dans l’assouvissement de sa passion.
Au seuil du grand départ, à l’automne de l’an dernier, Patrick Liebermann se ravisa sur son projet initial de donation de sa collection à un musée. En étant ainsi dispersée au feu des enchères, cette superbe collection restera selon son vœu, « vivante à travers des passionnés plutôt que dans un dernier sous-sol de musée oubliée de tous ».
Dr. Alain Briot