Curiosité savante et insatiable

Publié par la Gazette Drouot

Son intérieur reflétait cette quête de connaissance, et des liens pouvaient ainsi se nouer entre une sanguine de l’école italienne du XVIe siècle représentant un Cavalier vu de dos (autour de 800 €) et une gouache de Demachy figurant un épisode de la Genèse, Joseph expliquant les songes en prison (1 200 / 1 500 €) : pharaon ayant eu deux songes inquiétants chercha quelqu’un capable de lui en donner la clef ; ce fut un jeune prisonnier hébreu, Joseph, qui, libéré, devint l’homme le plus puissant d’Égypte aux côtés du souverain.
Un dessin de Claude Mellan résume le regard de René Huyghe sur la création, cherchant à percer le mystère de l’œuvre et de l’artiste. À ce moment où l’inspiration du peintre face à son modèle prend corps, son talent faisant le reste. Le processus se répète sous d’autres cieux, dans d’autres civilisations. Par exemple, dans une page du Shâhnâmeh où le miniaturiste persan choisit de s’éloigner de la représentation traditionnelle du roi Zahdak, qui avait pactisé avec le démon pour usurper le trône de Jamshid, qu’il tua ; condamné à nourrir de cervelles humaines deux serpents accrochés à ses épaules, il sacrifiait chaque jour des innocents. Faridun le fit prisonnier, puis l’enchaîna dans une caverne sur les hauteurs du mont Damavand, contraignant les serpents à le dévorer, épisode généralement illustré. Ici, l’usurpateur comparaît devant un descendant de Jamshid. Le mobilier choisi date principalement du XVIIIe siècle français ; mais là encore se démarque son esprit curieux, avec un cabinet à gradins plaqué d’ivoire d’un travail hybride anglo-indien (4 000 / 6 000 €) s’intégrant dans un décor constitué entre autres de sculptures de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance, où une main en marbre symbolise ce qui compte le plus pour lui.
Lors d’une émission télévisée du Grand Échiquier de Jacques Chancel, il confiait : « Je crois que l’homme doit toujours inventer, toujours créer, car plus important que le présent, il y a le futur. » Sans omettre les œuvres du passé...