Hyacinthe Rigaud (1659-1743) et atelier

Hyacinthe Rigaud (1659-1743) et atelier

Portrait de Michel-Robert
Le Pelletier des Forts (1675-1740)
Huile sur toile
148 x 114 cm

C'est en 1727 que Michel-Robert Le Pelletier des Forts (1675-1740), comte de Saint-Fargeau, sollicita Rigaud pour un portrait de grand format, «entièrement original», et dont la présente réplique d'atelier illustre du net succès qu'il remporta. Payé 3000 livres, somme correspondante à la complexité du décorum et à l'ostentation de la pose, l'image de Le Pelletier ne fut pourtant jamais honorée par la gravure, perdant peu à peu son identité. Diffusée par quelques copies et répliques elle fut ainsi identifiée par erreur comme effigie de Germain-Louis Chauvelin (1685-1762), marquis de Grobois.
La toile originale, datée, signée et dont la commande est confirmée par les archives familiales, est d'ailleurs toujours conservée dans la descendance du modèle et différentes versions sont connues (voir Stéphan Perreau, Hyacinthe Rigaud, Catalogue concis de l'oeuvre, Sète, mai 2013, cat. P.1347, p. 276). L'une des meilleures répliques, est aujourd'hui conservée au musée des Augustins de Toulouse et correspond probablement à celle commandée en 1727 par le célèbre banquier Samuel Bernard. Notre version, comme toujours dans le cas d'une oeuvre issue de l'atelier, montre plusieurs mains de spécialistes ayant oeuvré à sa confection. Le visage, traité avec finesse et grande rigueur, constitue l'élément fort du tableau, celui qui capte l'oeil du spectateur. Les drapés (rideau et vêture) montrent, par leur fidèle reproduction, que le maître, à défaut de participer directement à l'origine de la confection, retoucha probablement la toile, comme pour maintenir le haut degré de finition des répliques sortant de son atelier. Conseiller au parlement (1695), maître des requêtes (1698), conseiller d'Etat, intendant en Languedoc (1698), intendant des finances (1701), membre du conseil de Régence (1719), Le Pelletier des Forts tint les fonctions de contrôleur général de 1726 à 1730 charge nouvelle dont le tableau commémore le souvenir. L'intendant siège dans un élément récurrent du décorum utilisé par Rigaud dans les années 1720-1730: un fauteuil à accoudoir ornée d'acanthes que l'on retrouve dans les effigies contemporaines de Samuel Bernard (Versailles, musée National du château), d'Antoine Pâris (Londres, National Galerie), du cardinal de Saint-Albon (Los Angeles, Getty museum) ou de Philibert Orry (copie à Versailles). Quant à l'encrier, avec ou sans la sonnette, on le trouve notamment dans le portrait de l'archevêque de Paris, Vintimille du Luc (Rochester, memorial art Galery), ou dans celui du cardinal Fleury (Londres, Goodwood House). Comme tous les hommes liés aux services de l'Etat, Le Pelletier tend vers l'extérieur de la composition, une lettre sur laquelle subsistent les traces de l'expression «au Roy», preuve qu'il tenait ses décisions directement du roi. Académicien honoraire de l'Académie des Sciences depuis le 20 juillet 1727, le contrôleur général était le fils de Michel Le Peletier de Souzy (membre du conseil de Régence), et épousa, le 14 septembre 1706, Madeleine de Lamoignon de Basville (1687-1744), fille d'Urbain-Guillaume de Lamoignon de Basville (1674-1759), dit «M. de Courson», comte de Montrevault, marquis de Lamotte Champs-Deniers, fils du célèbre intendant du Languedoc peint par Jean Ranc (Montpellier musée Fabre). C'est à Jean-Baptiste Santerre que nous sommes redevables de l'effigie de Mlle de Lamoignon, réalisée en 1707 à l'occasion de son mariage (huile sur toile). H. 101; L. 80,5 cm.

Vente Paris, Hôtel Drouot, 21 décembre 2004).

Nous remercions Monsieur Stéphan PERREAU, spécialiste de Hyacinthe Rigaud (1659-1743), auteur d'une monographie et du Catalogue concis de l'oeuvre de Hyacinthe Rigaud (publication mai 2013), qui nous a aimablement aidé à rédiger cette fiche