DU COMMERCE DE LA SOIE À LA COLLECTION


Publié par la Gazette Drouot

Plus d’une centaine de lots de cette vente font partie de la collection de « Monsieur S. ». Pas de patronyme, donc, mais on dispose tout de même de renseignements. En 1853, à l’âge de 17 ans, le fils aîné d’une famille suisse spécialisée dans le commerce de la soie est envoyé à Milan, afin de se former et d’apprendre plusieurs langues étrangères nécessaires au négoce. Quatre ans plus tard, il part pour New York, où il noue de solides relations commerciales. De retour en Suisse, en 1861, il fonde la première entreprise familiale, dédiée au commerce de la soie en provenance d’Italie, de Chine et du Japon. La tradition perdure avec son fils aîné, qui se perfectionne en Italie du Nord, à New York et se rend en Extrême-Orient en 1883-1884. Au début du XXe siècle, la nouvelle génération prend le relais et entre dans l’entreprise familiale, donnant lieu à de nombreux voyages en Orient et Extrême-Orient, de 1912 à 1916. De ces fréquents voyages, ils reviennent avec une connaissance intime de l’art de ces contrées, constituant une collection d’arts japonais et chinois. L’art des armes – un ensemble de katana, wakizashi, saya, tsuba et menukki est estimé autour de 4 000 € – y côtoie les objets de la cérémonie du thé, telle un verseuse « katakuchi » en laque negoro, la panse côtelée, réalisée à l’époque Momoyama (1573-1603) et ici évaluée quelque 1 000 €. La sérénité des représentations du bouddha peut être appréciée et méditée, soit avec celle en bois au visage laqué or, statuette réalisée au Japon à l’époque Kamakura (2 000 € environ), soit avec une autre, en bronze à patine brune, les chairs dorées au mercure, un travail chinois de l’époque Ming (1368-1644), pour lequel il faut prévoir environ 3 000 €. Cette collection réunie sur plusieurs générations pour évoquer un art de vivre, une appréhension de la culture de ces deux pays, est entourée d’objets appartenant à divers amateurs.

L’art contemporain asiatique y a sa place, notamment avec cette Maternité de Li Chen. La première exposition de ce sculpteur en France eut lieu en 2013, place Vendôme, où les passants étaient surpris par la monumentalité légère de ses œuvres. Les principes bouddhistes et taoïstes y sont associés à des formes occidentales ; il puise ses thèmes dans des sujets simples, évocateurs de l’harmonie de la vie. Thomas Lee souligne, dans la préface à l’exposition de l’artiste à Singapour, en 2004 : « Les œuvres de Li Chen portent en elles un esprit à la fois dynamique et zen, une coexistence du réel et de l’irréel, une perfection et une vigueur, qui aboutissent finalement à une stimulation visuelle détonante. »


Coupe en porcelaine émaillée verte, jaune, bleue et manganèse à l’intérieur d’une réserve quadrilobée ornée d’un lettré sur un pont, entourée de quatre autres, dont deux à décor de doubles gourdes et deux en forme d’éventails ; au revers, la marque “fuku” dans un carré.
Japon, fours de Kutani, époque Edo (1603-1868).
Diam. 47 cm.
Estimation : 8 000 / 10 000 €