Le chemin des étoiles passe par l’Orient

Publié par la Gazette Drouot

Aristote (384-322 av. J.-C.) et Ptolémée (100-168) sont les premiers noms de l’astronomie. Deux figures incontournables, qui ont introduit des modèles  que l’on sait aujourd’hui incorrects  et dominé la pensée scientifique pendant près de deux millénaires. Reprenant les réflexions d’Aristote, Ptolémée a posé les bases du géocentrisme, soit l’idée que la Terre, située au centre de l’univers, est un objet immobile autour duquel se meuvent tous les autres objets célestes. Un système qui fut accepté jusqu’au XVIe siècle en Europe, jusqu’à l’heure de la révolution copernicienne. Dans le monde islamique, en revanche, d’importants progrès se produisent dès le IXe, qui continueront jusqu’au XIIe siècle. Un véritable âge d’or, rendu possible par la protection éclairée de deux califes de Bagdad de la dynastie des Abbassides, Al-Rashid et son fils Al-Mamun. De nombreux ouvrages sont publiés. Traduits en latin, à Tolède notamment, ils gagnent peu à peu le monde occidental, figé dans la superstition religieuse. Les plus beaux objets fabriqués durant cette période faste sont les astrolabes, dont l’invention remonterait au Grec Hipparque (vers 190-120 av. J.-C.). Muhammad Al-Fazari (mort en 796 ou en 806) est réputé avoir construit le premier. Un rarissime modèle du IXe siècle figurait dans les collections du musée de Bagdad ; il a été perdu lors du pillage de 2003, au cours duquel des milliers d’objets d’une valeur historique inestimable ont disparu ou ont été vandalisés. Ils ont heureusement été produits en nombre dans le vaste territoire conquis par l’Islam, allant jusqu’au Maroc et l’Espagne andalouse. L’objet fournit une projection de l’univers à plat, donnant la latitude exacte de l’endroit où l’on se trouve grâce à l’angle formé par l’horizon et un corps céleste. En plus d’être un instrument scientifique des plus efficaces, il est du plus bel effet esthétique. Deux qualités qui le portent au firmament des enchères.

Le 2 février 2015, la maison Tessier - Sarrou & Associés présentait un exceptionnel astrolabe maghrébin du XIVe siècle, construit par un certain Muhammad Ibn Qâsim al-Qurtubi en l’an 719 de l’hégire, au mois de joumada, soit en mai 1319. 312 480 € s’accrochaient dans les fils ciselés de son araignée, le disque ajouré représentant le cercle écliptique et les vingt-trois étoiles principales. Ces dernières années, plusieurs autres modèles ont rayonné à Drouot, mais pas aussi hauts, car plus récents. La cote, stable, oscille autour de 50 000 € : 55 000 € le 26 mars 2012, chez Enchères Rive Gauche, pour un modèle créé au XIIIe mais remanié à des époques ultérieures, 47 000 € le 13 avril de la même année pour un astrolabe persan daté 1817-1818, chez Chayette & Cheval, et 75 000 € chez ces derniers encore, mais le 21 décembre 2016, pour une production du XVIe siècle, probablement marocaine, présentant la particularité d’inclure une boussole.