Mime Marceau

Par Camille Marceau, l'une des fille du Mime

Au cours de sa longue carrière, Marcel Marceau va porter l’art du mime sur les scènes du monde entier, brisant les frontières de la langue et redonnant à cet art une envergure cosmopolite et populaire. Que ce soit d'une façon soliste ou en tant que dramaturge au travers de sa compagnie de mimodrame, il ne cessera de questionner l'art théâtral par le parti pris du silence.

En 1978, il fonde l’école internationale de mimodrame avec la volonté et l’espoir farouche de réaliser une de ses aspirations les plus profondes : l’humanisme des peuples, l’art comme point de rencontre de toutes les cultures où plus de vingt nationalités se sont cotoyées.

Il disait : « Dans mes mimodrames et dans mes pantomimes au théâtre, je peux construire un monde tel que je voudrais qu’il soit, montrer la déchirure, le mal, en ne montrant pas l’abandon mais un cri d’espoir. Je crois à la rédemption humaine à travers le théâtre. »

Il voulait créer un univers à l'image du poète entièrement tourné vers la célébration des Arts du silence, le mime et la peinture. Il en était de même pour les collections de sa propriété de Berchères-sur-Vesgres.
Acquise dans les années 60, il l'agença année après année dans la seule perspective d'y créer un monde à part, en retrait de la folie humaine, où les souvenirs, les objets et les oeuvres de toutes les cultures se côtoyaient mis en scène par l'artiste. Quand il revenait de ses tournées, parfois plus de trois cents représentations par an, des heures durant, la nuit, aux mêmes horaires que la sortie des théâtres, Marcel Marceau élaborait, pièce après pièce, son musée virtuel.


Influencé par le théâtre No, le Kabuki, il se ressourçait au contact de ses masques du théâtre oriental ou de la Comédia del arte où il puisait expressivité des traits et personnifications des caractères pour enrichir son célèbre personnage de Bip.

Et même au-delà des arts de la scène, la passion du dessin et de la calligraphie marquèrent son travail par la suspension, la retenue et la respiration de cette peinture gestuelle. Les signes noirs laissés sur le papier blanc entourés d'espace... Comment ne pas voir d'analogie avec la présence blanche sur le plateau traçant des signes dans le vide.


« La force de l'essentiel dans l'arabesque décrit par la main » nous dit Marcel Marceau qui peignait aussi, peut être, pour exprimer différemment de la scène son monde onirique hanté par les grands mystères humains.

Mon père était tout entier habité par son art, il le voyait partout dans le monde qu'il s'était créé, un monde du silence fait d'objets d'art et d'histoire, de tableaux de Maîtres, de peintures et de dessins, de collections, de livres, de photographies rappelant les rencontres et le parcours incroyable de cet enfant juif caché, qui par la force de sa volonté et de son talent, sorti pour toujours de l'ombre dans laquelle il fut plongé.
Un endroit magique où les carreaux colorés des fenêtres éclairaient de façon étrange les pièces et les choses inanimées, où l'on pouvait croiser un curieux automate, nous plongeant d'un seul coup dans l'enfance féérique et le rêve. Un lieu de paix...


Aujourd'hui, ce patrimoine unique, cet univers comme autant d'étoiles va se disperser à travers le monde, retournant finalement à ce public international qu'il a tant aimé.