LA PREUVE PAR LA MOSAÏQUE

Publié par la Gazette Drouot

En 1748, l’artiste Pietro Monaco postule pour participer à la restauration des mosaïques de Saint-Marc à Venise, à condition d’avoir fourni deux preuves de son talent. L’une des deux, Saint Antoine agenouillé auprès de la Vierge à l’Enfant prend le chemin des enchères.

Dès la fin du XVIIe, les œuvres de la basilique vénitienne présentent de nombreuses lacunes. Le mosaïste romain Leopoldo Dal Pozzo est sollicité, qui nettoie et consolide. À sa mort, en 1747, d’autres artistes postulent, à commencer par ses élèves de l’école romaine issus de l’atelier de Saint-Pierre. Pietro Monaco, graveur originaire de Belluno arrivé à Venise vers 1720, qui collabora avec Giambattista Tiepolo et Giambattista Pittoni, pose sa candidature ; elle est retenue le 6 septembre 1750, mais on lui demande de réaliser deux œuvres. Il s’agit de vérifier sa capacité à reproduire la technique et les styles utilisés à Saint-Marc et s’il possède la rigueur nécessaire pour une telle entreprise. Deux experts sont nommés pour juger de ces travaux, dont les cartons sont fournis par Giambattista Tiepolo. L’un, commencé en septembre 1750, met en scène La Compassion de saint Antoine ; il est conservé dans les réserves de la basilique. Le second, mentionné quelques mois plus tard, est celui présenté en vente. Satisfaits du résultat, tant du point de vue technique que sur le plan stylistique, les autorités désignent Pietro Monaco maître mosaïste. Il se met à l’œuvre immédiatement. C’est le début pour l’artiste d’une série de travaux de restauration dans des églises de Torcello, Murano et de La Sérénissime – tout en continuant son activité de graveur. L’iconographie de notre panneau est classique, qui met en scène la Vierge assise sur un trône, vêtue de bleu et de rouge, tenant de son bras gauche le Christ auquel on a donné l’attitude d’un bambin. À la douceur de cette image répond l’extase du moine franciscain, le cœur enflammé, avec à ses pieds un livre et un lys blanc, symbole de la virginité. Gageons que les amateurs, comme les experts de la basilique vénitienne, apprécieront ce beau morceau de mosaïque.